De l’importance de
déverrouiller le Lot
Réflexions après l’inauguration de l’écluse de Saint-Vite
Écluse se dit « lock » en Anglais, synonyme de « verrou ». Le Lot inférieur a clairement
besoin de « clés » pour faire sauter les verrous qui restent, après l’inauguration réussie de l’écluse de
Saint-Vite, le 14 avril 2021.
Au fil des discours prononcés à cette occasion, mémorable malgré des restrictions sanitaires, nous avons compris que certains élus – notamment Daniel Borie, maire de Saint-Vite et vice-président du Conseil Départemental de Lot et Garonne – étaient au départ sceptiques sur le rapport « bénéfices-coûts » des travaux de Saint-Vite, qu’il y avait d’autres priorités d’investissement. IWI et ses membres – plaisanciers et passionnés des voies navigables – peuvent comprendre cette appréciation des enjeux pour les habitants et travailleurs de la région.
Le prochain « verrou » à faire sauter sera celle de Fumel, et nous apprenons qu’Albas est à l’étude. Peut-être deviendra-t-il possible, à brève échéance, d’atteindre les abords de Luzech ? Ce sont toutes de bonnes nouvelles.
Nous voudrions faire les observations suivantes, dans l’esprit d’aider, nous l’espérons, à faire en sorte qu’un vrai déclic se produise, et que les collectivités qui y investissent en ressentent les avantages.
Pour qu’il y ait un avantage économique touristique grâce à Saint-Vite, et à l’avenir, grâce aux aménagements de Fumel et d’Albas, il faut faire venir les plaisanciers. Les randonneurs et les cyclistes aussi, mais ces usagers ne requièrent pas des investissements lourds en écluses. Il est incontestable qu’à l’heure actuelle, il y a très très peu de bateaux privés sur le Lot inférieur. Il n’y a pas non plus de bases de location de bateaux, même si jusqu’à tout récemment il y en avait deux, dont une importante (à Port Lalande). Cette activité nautique ne se produira pas directement à partir de la réhabilitation d’écluses ou la construction de nouveaux ouvrages nécessaires; elle doit être comprise, planifiée et encouragée. Il doit y avoir un horizon clairement défini pour que les rêves se matérialisent. Sinon, il y a un vrai risque que tous les acteurs soient déçus des résultats, et à juste titre.


Réouverture du Passage de la Garonne
Lorsque le passage de la Garonne fonctionnait, des bateaux de location faisaient la traversée depuis Buzet et le Canal de la Garonne (et vice versa). On surfait alors sur l’optimisme engendré par la construction des écluses de Castelmoron et de Villeneuve, et de la réalité des nombreuses installations mises à la disposition des plaisanciers (dont l’impressionnante marina de Port Lalande).
La triste réalité – maintenant que le passage est fermé – est que les éclusiers de Castelmoron et de Villeneuve sont peu sollicités, et que Port Lalande est l’ombre de lui-même. Heureusement, de nombreuses installations – le Temple, Fongrave – sont bien entretenues et même améliorées, comme à Sainte-Livrade, mais elles sont sous-utilisées. Clairac, par exemple, n’est actuellement valorisé ni comme halte ni comme centre d’activités soutenues par le tourisme.
Par conséquent, la priorité pour inverser cette tendance est de rétablir ce passage en Garonne, en rendant son fonctionnement aussi fiable qu’il l’était à l’origine.
Nous sommes pleinement conscients des problèmes de gestion à ce sujet, et du problème de l’écluse de cellulose de Buzet. Mais nous espérons que des solutions pourront être trouvées, et cela le plus rapidement possible.
L’état actuel du passage est un gros obstacle au développement du tourisme fluvial (puisque le Lot n’accueille plus de bateaux privés) et au développement économique des bateaux de location. L’ampleur des investissements ne devrait pas dépasser celle du franchissement de l’obstacle de Fumel, et toute l’économie touristique du Lot navigable en dépend.
Le projet « passage en Garonne » implique en effet trois volets sur l’infrastructure:
- l’écluse de la cellulose à Buzet,
- des dragages localisés en Garonne, et
- la réhabilitation du canalet entre la Garonne et Aiguillon ; et deux mesures d’accompagnement : le balisage du chenal, et l’assouplissement du règlement pour ce passage.
Utilisateurs potentiels - Bateaux privés et Bateaux de location
Si l’on devait écarter cette réouverture du passage en Garonne, qu’en serait-il des perspectives de la voie navigable du Lot prise isolément : rallongée par les ouvrages de Saint-Vite, Fumel et Albas?
Le premier point concerne les plaisanciers privés. On ne fera venir ces bateaux (plus grands que ceux des pêcheurs) que par l’amélioration des installations et leur promotion, en reconnaissant qu’ils devront être transportés par la route, à un coût important pour leurs propriétaires, tant que le passage en Garonne restera indisponible.
Les entreprises de location de bateaux et leurs exigences spécifiques sont fondamentales. Les plaisanciers privés auront la liberté d’explorer la rivière et d’emprunter le transbordeur tel qu’il est projeté à Fumel. Ce n’est pas nécessairement le cas des bateaux de location, ni d’ailleurs des péniches privées, qui ne conviennent pas toujours au levage par élingues (même si de capacité suffisante en tonnage).
Il ne fait aucun doute que les bateaux et voiliers privés sont soulevés par élingues dans le monde entier, dans des ports maritimes et intérieurs. Le problème spécifique du bateau de location est le risque de déformation de la coque (en polyester) lors du levage.
Les propriétaires privés peuvent accepter une légère déformation qui provoquerait, par exemple, une mauvaise fermeture des portes.

Ces difficultés liées aux bateaux de location ne sont peut-être pas bien appréhendées, même par des personnes professionnellement ou techniquement qualifiées.
C’est notre espoir, et celui de nos amis et collègues (en France et ailleurs dans le monde) que les efforts et investissements passés et futurs se révèlent pleinement fructueux. Pas en termes abstraits, mais en termes de renommée, d’utilisation durable et de rentabilité économique.
Péniches-croisière
Il convient de noter qu’un usage nouveau pourrait apparaître sur le Lot et devrait également être pris en considération pour la conception du transbordeur : il s’agit de péniches portant 40 personnes, pour une semaine d’expérience avec hébergement à terre, alliant des séquences de croisière aux boucles de découverte dans le territoire.
Le Lot est une voie navigable magnifique, une infrastructure extraordinaire, qui peut servir la nouvelle économie post-pandémie dans toute la vallée encore mieux qu’elle ne servait l’économie industrielle du 19e siècle…
Présentation d’IWI

IWI, à l’origine de l’initiative CANALET, est une association à but non lucratif qui rassemble structures (publiques et privées) et individus qui soutiennent la conservation, l’utilisation, le développement et la bonne gouvernance des voies navigables dans le monde entier.
Nous sensibilisons le public aux bienfaits de nos voies d’eau pour une large gamme d’activités, depuis leur fonction historique de transport de marchandises et de personnes jusqu’à toutes les formes de loisirs sur et au bord de l’eau.
Nous sommes convaincus que les rivières aménagées et les canaux ont un impact positif sur la vie des gens. L’environnement de la voie d’eau, en ville ou à la campagne, invite à se détendre et à se livrer à des activités de plein air qui contribuent au bien-être et rapprochent de la nature.
Que l’on parcoure un canal à pied, à vélo ou à cheval, qu’on soit pêcheur ou plaisancier, peu importe comment on vit la voie d’eau, nous sommes convaincus que tous doivent y avoir accès. Elle offre une «respiration» inestimable dans nos vies effrénées. Par leur riche histoire, leurs valeurs architecturales et paysagères, les voies navigables nous inspirent et nous relient à notre passé.
IWI défend les projets de remise en état de voies navigables abandonnées. Nous parrainons la World Canals Conference (WCC), qui se tient chaque année.
Parmi nos membres figurent des gestionnaires de réseaux navigables, des structures associatives et des entreprises actives dans le secteur nautique et l’ingénierie, des usagers et des experts dans différentes disciplines. Tous partagent leur intérêt pour l’histoire comme pour l’importance actuelle des voies navigables. Les membres sont issus de 27 pays.